Témoignages

Expériences des pairs

Hans

Hans

Je décris ci-après, à la demande de NMP Belgique, l’évolution de ma maladie. C’est une histoire assez longue, mais je vais essayer d’être concis. Personnellement, je souffre d’une polyglobulie de Vaquez. PV est l’abréviation de polycythaemie Vera ou maladie de Vaquez-Osler.

Permettez-moi, tout d’abord, de me présenter. Je m’appelle Hans Annys et j’ai presque 69 ans. J’habite à Assebroek (Bruges) et mon épouse se nomme Ingrid. Nous avons trois enfants et cinq petit-enfants. Nous aimons voyager et, heureusement, nous pouvons continuer à le faire pour le moment. Bref, voici mon histoire.

Ce qui a précédé.

Au cours de mes dernières années de carrière – je travaillais comme chef-adjoint chez B-Cargo – j’ai souffert de plus en plus souvent de fatigue. Je ressentais de plus en plus souvent des douleurs osseuses et musculaires qui apparaissaient souvent à l’improviste. Plusieurs analyses de sang n’ont pas apporté de réponse définitive à la question de savoir ce qui se passait réellement. Aucune inflammation réelle n’a été décelée dans le sang, seule une légère suspicion de goutte – héréditaire – a été envisagée. Sans trouver quoi que ce soit de plus, j’ai appris à vivre avec. Toutefois, il est devenu de plus en plus difficile de continuer à travailler au sein d’une équipe et d’y accorder toute mon attention. Je perdais mon attention après les premières heures de travail et, si j’en avais l’occasion, je passais l’après-midi à dormir sur mon canapé. Je me couchais tôt le soir et je recommençais à travailler, sans avoir réellement dormi, tôt le matin. Au cours de l’année 2011, à la suite d’une réorganisation du département marchandises de B-Cargo, nous avons eu la possibilité de prendre notre retraite anticipée. J’ai sauté sur l’occasion en raison des difficultés croissantes que je ressentais au travail. Arrêter de travailler à 57 ans ! Je n’y avais jamais pensé. Mon épouse et moi avions toujours imaginé que je travaillerais jusqu’à 60 ans et qu’elle prendrait, elle-même, une retraite anticipée. Les choses se sont passées différemment, non seulement à cause de ma maladie, mais aussi parce que les règles liées à la retraite anticipée ont été modifiées ! La première année s’est plutôt bien passée. La fatigue se faisait plus discrète. C’était bien mieux qu’avant. Nous pensions alors que le problème était lié au stress du travail. Malheureusement, au fil des ans, la situation s’est quelque peu aggravée. La fatigue s’est faite parfois insupportable tandis que les douleurs osseuses n’ont fait qu’empirer. Je dormais – ma femme tenait l’horloge à l’œil – durant 14 à 15 heures par jour, et ce durant de nombreux jours. Quelques heures sur le canapé durant la journée, tôt au lit le soir et je ne dormais jamais le matin. Les choses n’ont fait qu’empirer, particulièrement après des vacances en Espagne, au printemps 2017. Cela d’abord été une maladie de Lyme qui était redoutée (piqûre de tique ?). Mais j’étais à peu près certain de ne pas avoir été piqué par une tique. Il est apparu que cela n’avait pas été le cas. Test négatif. On pouvait exclure l’idée de la maladie de Lyme ! Courant avril 2018, un peu par désespoir de cause, je suis orienté vers un cardiologue. Les analyses de sang ne sont, là encore, pas concluantes. Aucun signal d’alarme ne semblait se déclencher et le cardiologue n’a pu diagnostiquer que de légères arythmies cardiaques. Soit dit en passant, celles-ci n’avaient rien de grave. Durant le test du vélo d’appartement, le médecin m’a dit ne pas savoir ce que je faisais dans son service. « Votre physique est celui d’un quinquagénaire » s’amuse-t-il. J’avais alors 63 ans. Comme je commençais à perdre la mémoire, sur les conseils de mon médecin traitant, j’ai consulté un neurologue. Après différents examens – dont un scanner du cerveau – rien n’a pu être trouvé. Le neurologue m’a alors demandé si j’étais prêt à consulter un psychologue, et c’est ce que j’ai fait ! Là encore, le diagnostic n’a pas été posé. Les pertes de mémoire étaient, à mon âge, un phénomène tout à fait normal. On peut donc dire que la polyglobulie de Vaquez est présente dans mon corps depuis un certain temps déjà. La situation n’a fait qu’empirer alors qu’on vivait pleinement le coronavirus. Nous sommes en 2020. Lors de mon contrôle sanguin annuel au mois de février, mon taux d’hématocrite était encore bon. Mais, au cours de cette même année, j’ai commencé à avoir des rougeurs sur ma poitrine. Comme il faisait beau et que j’essayais d’être le plus possible à l’extérieur, j’ai pensé que c’était dû au soleil. Je ressentais aussi de plus en plus souvent des démangeaisons et je commençais à transpirer durant la nuit. Mon lit était parfois trempé de transpiration. Le véritable signe avant-coureur avait fini par se manifester. Puis, au cours de l’année, j’ai commencé à avoir très mal aux pieds. En fait, j’étais incapable de dire dans quelle mesure je me sentais mal.

Le diagnostic.

Courant du mois de décembre, tout est devenu trop lourd pour moi. On a même envisagé que j’ai attrapé le coronavirus. Mais là aussi, le test a été négatif. Un dimanche soir, j’ai eu l’impression de faire une crise de foie. Cela m’était déjà arrivé plusieurs fois et j’ai eu un calcul rénal. J’ai alors pris des médicaments pour calmer la douleur. Le lendemain, je suis retourné chez le médecin généraliste. Il a été décidé de faire une nouvelle prise de sang pour déterminer si c’était bien le foie qui était touché. Ce n’était pas le cas. Mais on a fini par découvrir autre chose ! Hémoglobine : 19,8 Hématocrite : 60 Globules rouges : 7,19 Des chiffres pour le moins alarmants ! Selon le médecin, il y avait une forte suspicion de polycythémie ou de maladie de Vaquez-Osler. Il faudra encore attendre quelques semaines pour avoir des résultats définitifs. Noël 2020 et le passage à l’an neuf, comme pour la plupart d’entre-nous se sont déroulés dans l’incertitude du corona, mais, à mon niveau, la situation s’est fortement dégradée. Le mardi 5 janvier 2021, on m’a finalement diagnostiqué – via une analyse de laboratoire – une PV avec mutation Jak2 V617F. J’ai eu un peu peur. Le monde s’écroulait littéralement sous mes pieds. Le mercredi matin, le 6 janvier, j’ai reçu un appel de mon médecin généraliste. Elle s’était déjà occupée de tout.

Le traitement.

J’ai immédiatement commencé à prendre de l’Asaflow – un anticoagulant – pour prévenir les thromboses. Le mercredi 13 janvier 2021, j’ai eu une consultation avec un hématologue. Il est d’ailleurs devenu mon hématologue attitré. Tous les traitements et examens sont désormais effectués à l’hôpital AZ Sint-Jan de Bruges. L’hématologue m’a expliqué ce qui se passait et comment une PV était traitée. J’ai immédiatement commencé à prendre de l’Hydrea en plus de l’Asaflow. Pendant les premières semaines, des saignées ont été mises en place. L’idée : prélever 400 ml de sang, une fois par semaine, et ce, trois semaines d’affilée. Après quatre semaines, j’ai effectué un contrôle avec mon hématologue. J’ai fait une prise de sang à l’hôpital la veille. Mais j’avais aussi effectué une prise de sang chez mon généraliste. Les médicaments et les saignées ont, semble-t-il, fait leur effet. Toutes les valeurs sanguines allaient dans la bonne direction. L’Asaflow et l’Hydrea ont ainsi été prescrits pour les semaines suivantes. Mais, après la deuxième semaine, j’ai commencé à faire de fortes fièvres. 40°C et parfois un peu plus ! Le lundi 1er février 2021, je suis en consultation urgente chez mon généraliste. Je ne pouvais plus rester dans cette situation. Je ressentais des douleurs terribles dans les pieds, j’avais une forte fièvre et je subissais des sueurs terribles durant la nuit. Mon épouse et moi ne pouvions plus dormir ensemble. Un lit propre et une lessive quotidienne. Tel était devenu le message. De mon côté, je ne pouvais plus rien faire. Vraiment rien. Le généraliste a contacté l’hématologue qui a décidé que je ne devais plus prendre d’Hydrea pour le moment. Un nouveau rendez-vous en hématologie a été décidé. Mais la condition préalable à mon admission était un test PCR. Le Coronavirus restait en arrière-plan. Sans test PCR, interdiction absolue de rentrer dans un hôpital de jour. Heureusement, le test s’est avéré négatif. Le jeudi 4 février 2021, je suis admis en hôpital de jour. Toutes sortes de tests vont être effectués. Prise de sang pour le labo, examen des poumons, analyse d’urine… Tous ces tests étaient nécessaires et ce n’est qu’une fois effectués que j’ai pu aller chez l’hématologue. Les résultats ont montré que mes taux sanguins, depuis que je ne prenais plus d’Hydrea, avaient repris une mauvaise direction, mais aussi qu’il y avait des traces de sang dans mes urines. Heureusement, mes poumons allaient bien. Manifestement, j’étais totalement intolérant à l’Hydrea (ce qui explique les fortes fièvres). Les médecins ont donc décidé de passer à Jakavi. Mais avant cela, je devais passer un test de dépistage de la tuberculose. Les résultats étant bons, j’ai pu commencer le Jakavi en 10 mg le samedi 6 février 2021. Le principal inconvénient est que je dois consulter l’hématologue toutes les quatre semaines. Mais bon, qu’importe pour autant que cela puisse m’aider. Mercredi 10 février 2021. Retour à l’hôpital pour une saignée. Et l’après-midi du même jour, on m’a fait un scanner de la rate. Le soir même, je retournais chez l’hématologue. Le principal inconvénient a, une fois de plus, été le Corona. Entre chaque examen, j’étais obligé de rentrer chez moi en voiture. Impossible en effet de prendre un café ou de manger quelque chose dans la cafétéria de l’hôpital. Ce jour-là, mes valeurs sanguines avaient repris la bonne direction. Quatre jours de Jakavi avaient suffi. Ma rate semblait légèrement gonflée. Mais la prise de Jakavi ne devrait pas poser de problème. Dès ce moment-là, j’ai consulté mon hématologue toutes les quatre semaines. Mes valeurs sanguines s’amélioraient de plus en plus, mais la prise de Jakavi a eu des conséquences néfastes sur mon cholestérol. On a ajouté un médicament en plus. Les saignées n’étaient plus nécessaires et ne le sont toujours pas.

Vivre avec une NMP et, en particulier, une PV

Depuis, tout se passe plutôt bien. Mes valeurs sanguines sont maîtrisées depuis plus de deux mois. Il n’en a pas toujours été de la sorte, bien sûr. Au début, après avoir commencé à prendre de l’Hydrea, j’ai dû me battre avec moi-même. Je ne pouvais plus rien faire et je ne voyais pas l’intérêt du traitement. Les effets secondaires du Jakavi ne sont pas des moindres, mais ce n’est pas différent. Les douleurs musculaires et les crampes sont parfois terribles. C’est d’ailleurs peut-être dû en partie aux inhibiteurs de cholestérol. Pendant longtemps, j’ai continué à souffrir de démangeaisons terribles. Parfois même, j’étais très déprimé. Surtout à l’époque du corona. Tout était trop lourd à porter. Au début de cette année, j’ai soudainement ressenti des douleurs intenses dans les avant-bras et les jambes. Le bout de mes orteils et de mes doigts était parfois très douloureux. Sur les conseils de mon généraliste, j’ai consulté un médecin du sport. Une scintigraphie osseuse a été effectuée. On pensait à de l’arthrose. Mais j’ai très peu d’arthrose pour mon âge. Ce n’était donc pas le problème. Le 16 mai 2023, on a effectué un EMG au sein du service de médecine physique. Une prise de sang supplémentaire a aussi été effectuée pour vérifier si je n’étais pas en train de devenir diabétique. Ma glycémie est toujours à la limite du diabète. Heureusement, cela n’a pas posé de problème. Le 22 mai 2023, j’ai eu un entretien téléphonique avec mon généraliste. Il a consulté tous les ouvrages de référence en la matière et les a comparés aux résultats de laboratoire. Il s’avère que je souffre d’une polyneuropathie due à la PV. C’est ennuyeux, mais je peux vivre avec. Si les choses s’aggravent, je peux toujours aller voir un kiné. Nous verrons plus tard. Quoiqu’il en soit, heureusement, comme je l’ai écrit, tout va plutôt bien. Je suis maintenant un régime pour contrôler les lipides dans le sang. Avec Jakavi, j’ai pris beaucoup de poids. J’avais 84 kg quand j’ai commencé. Mon hématologue m’avait prévenu dès le départ. Il m’avait même conseillé de ne pas dépasser les 90 kg ! Je n’ai pas pu relever ce défi et, au début de cette année, j’ai connu une véritable escalade. J’ai même pesé 97,5 kilos. J’ai donc commencé un régime, sous la contrainte de l’hématologue et de mon généraliste. Je devais perdre au moins 10 kilos ! On m’a conseillé de consulter un diététicien. Mais j’ai essayé seul et je suis arrivé à de bons résultats. Aujourd’hui, je pèse 85 kg. Je fais beaucoup d’exercice et je surveille mon alimentation. Résultat : je me sens beaucoup mieux depuis deux mois. Si je continue à consulter mon généraliste pour des prises de sang régulières, je ne dois plus consulter mon hématologue que toutes les 12 semaines. A chaque rendez-vous, si tout semble sous contrôle, il me prescrit du Jakavi pour les douze semaines suivantes. Nous pouvons donc voyager pendant des périodes plus longues.

Le traitement actuel

Jakavi 10 mg. 2 X jour (Pv) Rosuvasttin Sandoz 5 mg. (cholestérol) Lercanidipine EG 20 mg. (tension artérielle) Asaflow 80 mg. (anticoagulant)

Je prends également des comprimés de magnésium pour les crampes. Cela semble m’aider quelque peu. Les crampes nocturnes sont moins fréquentes et moins graves.

Ma conclusion.

NMP – dans mon cas une polyglobulie de Vaquez – est une maladie grave et incurable. Dès le début, cela a été difficile et le traitement était compliqué. Mais quand on veut, on peut ! Je peux – à condition de faire attention à mon alimentation et de doser mes efforts – effectuer pas mal d’activités. Parfois, ma mémoire – sérieusement – me fait défaut. Mais il existe des remèdes, aussi, à cela. À savoir avoir, avec soi, un stylo et du papier. NMP Belgique m’a beaucoup appris et m’a montré que nous ne sommes jamais seuls. A posteriori, j’ai compris qu’une maladie comme une NMP ne se manifeste pas du jour au lendemain. Certainement pas une PV. Mais cela reste ma perception personnelle.